Au début du néolithique, au 5ème millénaire avant notre ère, l’agriculture et l’élevage font leur apparition dans l’ouest de l’Europe bouleversant totalement le mode de vie des peuples.
Les hommes se sédentarisent et construisent les premiers villages, effectuent les premiers échanges commerciaux en troquant des produits fabriqués en grande quantité dans des ateliers contre des matières premières introuvables sur place et adoptent des rites funéraires qui se complexifient. Pour la première fois, une réelle hiérarchie structure la société.
C’est à cette époque qu’apparaissent les mégalithes, principalement en Europe mais également sur les autres continents.
La Bretagne est l’une des régions les plus prolifiques en menhirs, dolmens, cairns et cromlechs et parmi les nombreux sites répertoriés, Carnac est certainement le plus vaste et le plus célèbre.
Un peu d’histoire
La Bretagne au Néolithique
La Bretagne a été occupée dès le Paléolithique inférieur lorsque des tribus s’installent le long des côtes et dans la vallée de la Vilaine. Il faut cependant attendre la fin de la dernière glaciation pour que les sites se multiplient et pour qu’une véritable industrie lithique se développe dans la région.
L’amélioration des conditions climatiques, l’extension des zones forestières et l’apprentissage de l’agriculture permettent aux hommes d’abandonner leur vie nomade et de quitter leurs grottes et abris sous roche pour construire de véritables villages.
C’est ainsi que le site de Carnac est occupé sans discontinuité depuis le 5ème millénaire avant JC. Cette petite commune du Morbihan située en bordure de l’océan Atlantique concentre un incroyable nombre de vestiges préhistoriques répartis sur 140 sites privés ou publics dont les plus célèbres sont les alignements mégalithiques et le tumulus Saint-Michel.
Ces témoins importants de notre histoire sont à l’origine de légendes et ont fait l’objet de maints débats concernant leur fonction. Si leur souvenir s’est longtemps perpétué dans la tradition orale, il faut attendre le milieu du 18ème siècle pour que des scientifiques s’intéressent réellement aux mégalithes en général et à ceux de Carnac en particulier.
Plusieurs auteurs du 19ème siècle dont Prosper Mérimée – reconnu également en qualité d’archéologue et d’historien – publient des ouvrages consacrés aux mégalithes de Bretagne.
James Miln et Zacharie Le Rouzic
En 1875, un aristocrate écossais féru d’antiquités et d’archéologie, James Miln, entreprend des fouilles à Carnac. Il engage un enfant du pays âgé d’une dizaine d’années, Zacharie Le Rouzic. Le jeune garçon qui n’a reçu qu’une éducation sommaire et qui vit dans la pauvreté n’était pas destiné à un avenir brillant. Miln se plaît cependant à le former et à lui communiquer sa passion pour les mégalithes. Il devient ainsi le principal collaborateur de l’Écossais.
James Miln décède en 1881 à l’âge de 62 ans. L’entièreté de sa collection rassemblée au cours des fouilles archéologues est léguée à la ville de Carnac. De plus, son frère Robert fonde le Musée de la préhistoire.
Zacharie Le Rouzic qui n’a que 17 ans devient le gardien du musée.
Il n’abandonne cependant pas l’archéologie et entreprend à son tour des fouilles dans la région. De nombreuses publications portent son nom et il acquiert une réputation internationale dans le domaine de l’archéologie et de l’histoire des mégalithes et des traditions bretonnes. Il entreprend également de photographier les sites découverts. Ces clichés permettent d’étudier des sites qui ont aujourd’hui disparus.
En 1910, il devient conservateur du musée de Carnac à qui il fait don de ses propres collections 17 ans plus tard. C’est pour cette raison que la municipalité décide de rebaptiser le bâtiment « Musée archéologique James Miln Zacharie Le Rouzic ».
Le site des alignements a été classé sur la liste des monuments historiques en 1889 et sur la liste indicative du patrimoine mondial de l’Unesco en 1996.
Les légendes
Si les alignements mégalithiques de Carnac conservent une grande part de mystère, ils ont alimenté depuis la nuit des temps l’imagination sans limite des hommes.
La plus connue est celle du pape Saint Cornély vivant au 3ème siècle. Selon la tradition, Saint Cornély aurait fui la persécution de l’empereur romain Trébonien Galle et aurait traversé la Gaule jusqu’à Carnac en compagnie de deux bœufs. Sentant ses poursuivants sur ses talons et bloqués par l’océan, il se serait caché dans l’oreille d’un de ses bœufs et aurait transformé les légionnaires en pierres. Plusieurs édifices religieux et civils de la région portent son nom, notamment l’église Saint-Cornély de Carnac érigée au 17ème siècle. Un Pardon, pèlerinage typiquement breton, est organisé en son honneur le deuxième dimanche de septembre.
Si l’on en croit les rumeurs, les âmes des soldats pétrifiés arpentent les alignements lorsque la tempête fait rage et les menhirs de Carnac viennent s’abreuver dans les ruisseaux durant la nuit de Noël.
Il paraîtrait également que des trésors sont enfouis sous certains menhirs mais toutes les personnes qui ont tenté de les chercher auraient trouvé la mort.
Et si vous vous promenez dans la région, ne soyez pas surpris de rencontrer des Korrigans, ces petits lutins bretons, qui ont élu domicile, dit-on, dans les mégalithes de Carnac.
Les interprétations
Si pour la plupart des historiens les menhirs de Carnac ont joué un rôle dans le culte des morts, d’autres ont émis l’hypothèse qu’ils servaient de calendrier pouvant donner des indications précieuses concernant les périodes importantes pour l’agriculture. D’autres encore soutiennent qu’il s’agit d’un observatoire astronomique basé sur les phases de la lune et permettant d’étudier la position des astres dans le ciel.
Les alignements
Les alignements ainsi que les autres mégalithes de Carnac forment un site préhistorique d’une importance capitale pour la compréhension de la vie au Néolithique. Avec près de 4.000 menhirs et plusieurs cairns, dolmens et allées couvertes répartis sur 4 kilomètres de long, il s’agit du plus grand ensemble mégalithique du monde. Plusieurs bâtiments ainsi que l’étang de Kerloquet ont été bâti sur le site qui a en conséquence subi des dégradations avant sa « redécouverte ».
Les menhirs sont répartis en plusieurs groupes dont les principaux sont :
- L’alignement du Ménec qui s’étend sur un peu plus d’un kilomètre de long et sur 100 mètres de large. Il comprend 1.099 menhirs rangés en 11 lignes orientées sud-ouest/nord-est. Le plus grand des menhirs du Ménec mesure 4 mètres de haut. À l’extrémité ouest, l’alignement se termine par un cromlech (cercle de pierres dressées).
Cet alignement se prolonge à l’est par celui de Toulchignan (100 mètres sur 70). - L’alignement de Kermario qui s’étend sur 850 mètres de long et 100 de large. Il se compose de 980 menhirs répartis en 10 lignes orientées sud-ouest/nord-est et se termine par un dolmen à l’extrémité occidentale. L’alignement de Kermario se prolonge à l’est par celui de Kerloquet constitué de 82 menhirs. C’est dans ce secteur que l’on peut découvrir un menhir de 4,5 mètres de haut dont la base est ornée d’une gravure représentant un soleil et des serpents. On y a trouvé plusieurs haches en pierre.
- L’alignement de Kerlescan s’étend sur 350 mètres de long et 140 de large. Il est constitué de 555 menhirs alignés en 13 rangées orientées est/ouest et se terminant en éventail. Cet ensemble comprend également deux cromlechs, un tumulus et un dolmen.
Ce secteur se prolonge par une série de 101 menhirs situés sur le territoire de La Trinité-sur-Mer et repris sous la dénomination de Petit-Ménec. Ces pierres dressées sont réparties en 7 files orientées vers l’est et 3 files orientées vers le nord-est.
Le tumulus Saint-Michel
Également situé sur le territoire de Carnac, le tumulus Saint-Michel se présente sous la forme d’un tertre mégalithique élevé vers 5 000 avant notre ère.
Ce monument funéraire mesure approximativement 125 mètres de long sur 50 de large et 10 de haut.
Il a été découvert en 1862 et la fouille du site a permis de mettre au jour une chambre funéraire comprenant un important mobilier, notamment des haches en jadéite et des parures.
Une deuxième campagne de fouilles a été menée par Zacharie Le Rouzic au début du 20èmesiècle. Il y a découvert un second dolmen. La présence de coffres de pierre semble indiquer que la nécropole était réservée à une seule personne de classe sociale élevée.
Le sommet du tumulus est surmonté d’un calvaire datant du 16ème siècle et de la chapelle Saint-Michel bâtie en 1926. Il s’agit du quatrième édifice religieux bâti à cet endroit. Le premier date du 6ème siècle et le deuxième, consacré à Saint-Cornély, a été érigé au 17ème siècle avant d’être détruit sous la Révolution et d’être reconstruit à l’identique en 1926.
Les femmes des marins venaient autrefois y prier pour leurs époux partis en mer.
En pratique
Maison des Mégalithes
Route des Alignements
Lieu-dit Le Ménec
Tel : 02 97 52 29 81
Site web : http://www.menhirs-carnac.fr
La visite
La visite des alignements mégalithiques de Carnac et du tumulus Saint-Michel nous plonge 7 000 ans en arrière. Une certaine émotion se dégage de ces immenses champs recouverts à intervalles réguliers de menhirs. Nous ne pouvons qu’admirer la patience et le savoir-faire de nos lointains ancêtres qui ont élevé plusieurs milliers de pierres dans un but mystérieux.
Peu importe la fonction réelle de ces mégalithes, ils sont les témoins d’une civilisation néolithique déjà bien structurée et organisée.
La découverte des mégalithes mérite amplement le détour et est une excellente activité à faire en famille.
La visite commentée dure approximativement 1 heure.
Il est également possible de s’inscrire à l’atelier « Gestes de la Préhistoire » qui permet de s’initier à différentes activités des hommes préhistoriques, notamment comment allumer un feu ou déplacer de gros blocs de pierre.
Cette animation dure approximativement 2h30 et peut être faite en famille puisqu’elle est ouverte aux enfants dès 6 ans.
Accessibilité
Il est recommandé de s’équiper de chaussures de marche (sandales à éviter) pour visiter les alignements dans de bonnes conditions. Les poussettes d’enfants sont autorisées mais déconseillées en raison de l’irrégularité du sol.
Le site est accessible aux personnes moins valides mais il est préférable de vérifier l’état du sol avant le départ.
Les sentiers n’étant pas balisés et le terrain pouvant être accidenté dans certains secteurs, les personnes mal- ou non-voyantes doivent être accompagnées.
Pour ces différentes raisons, les chiens d’assistance ou guides sont autorisés sur le site. En revanche, les autres chiens sont interdits.
Horaires et tickets
Autrefois, le site était en accès libre tout au long de l’année, mais la forte affluence de touristes occasionnait des dégradations regrettables.
Dorénavant, les visites libres ne sont plus possibles entre mars et octobre. Pendant cette période, le site n’est accessible qu’avec un guide. Les visites commentées sont toutefois gratuites pour les moins de 18 ans.
Le « Pass des Mégalithes » donne accès aux sites de Carnac, de Locmariaquer, du Petit-Mont et de Gavrinis, ainsi qu’au Musée de la Préhistoire à tarif réduit (économie réalisée dès la 2ème visite).
À noter : en raison des dangers résultant d’un affaissement de terrain survenu en 2012, le tumulus Saint-Michel ne se visite plus. Les objets qui ont été retrouvés à l’intérieur du tertre sont exposés au Musée de la Préhistoire.
En visite dans la région
La découverte des alignements mégalithiques de Carnac ne serait pas complète sans une visite de la Maison des Mégalithes et du Musée de la Préhistoire.
- La Maison des Mégalithes est ouverte gratuitement tous les jours de l’année excepté les 1erjanvier, 1ermai et 25 décembre. On y trouve des informations concernant le mégalithisme ainsi que des expositions temporaires. Le bâtiment est accessible aux personnes moins valides.
Adresse : Maison des Mégalithes, Route des Alignements, Lieu-dit Le Ménec. - Le Musée de Préhistoire James Miln – Zacharie Le Rouzic propose à ses visiteurs de découvrir l’une des plus importantes collections d’objets préhistoriques d’Europe ainsi que de nombreux documents et de maquettes retraçant l’histoire du mégalithisme et des archéologues qui ont permis de découvrir et de préserver ce fabuleux patrimoine.
Des conférences, des expositions temporaires ainsi que des animations sont régulièrement proposées, moyennant un supplément.
Ce musée est ouvert tous les jours sauf le mardi, de mars à novembre et durant les vacances scolaires d’hiver. Il n’y a pas de jour de fermeture durant les différentes périodes de vacances scolaires. La visite est incluse dans le « Pass des Mégalithes ».
Adresse : Musée de Préhistoire, 10 Place de la Chapelle, Carnac
Carnac est également une station balnéaire dynamique de la Baie de Quiberon. Les touristes apprécient ses plages de sable fin, les plaisirs de la baignade ainsi que les différentes activités culturelles ou sportives sans oublier les cures de thalassothérapie proposées tout au long de l’année dans la ville.
Autres lieux à visiter à Carnac :
- L’église Saint-Cornély qui fut bâtie en 1639 dans le style Renaissance.
De passage à Carnac, ne manquez pas de visiter l’intérieur de l’édifice qui abrite quelques œuvres remarquables, notamment des retables du 17ème siècle, un autel et une chaire en fer forgé du 18ème ainsi qu’un orgue construit par le frère carme Florentin Grimont pour l’église de Sainte-Anne d’Auray en 1775. L’orgue a déménagé à Carnac en 1866 et a été entièrement restauré en 1986.
Chaque année, le deuxième dimanche de septembre, un pardon accompagné d’une bénédiction des chevaux s’y déroule en hommage au Saint. - Le hameau de Saint-Colomban situé sur la commune de Carnac a préservé son caractère breton authentique. On y découvre des rues bordées de maisons en granit et une chapelle gothique flamboyant du 16ème siècle consacrée au moine et missionnaire irlandais Colomban de Luxeuil (543 – 615). Un pardon s’y déroule le premier dimanche d’août.
Un peu en retrait, la fontaine Saint-Colomban construite au 16ème siècle en style gothique se caractérise par sa succession de trois bassins qui servaient probablement pour la purification des paroissiens, pour l’abreuvement du bétail et comme lavoir.
Que manger à Carnac ?
Plus d’une quarantaine de restaurants sont installés sur le territoire de Carnac.
Ils proposent pour la plupart des plats typiquement bretons, poissons et plateaux de fruits de mer, crêpes et galettes déclinées en une multitude de versions salées ou sucrées.
L’huître du Pô reste cependant la spécialité incontournable de Carnac. Cette huître provient des ostréicultures installées depuis 1880 dans le petit port de l’Anse du Pô. Elle y est cultivée par des producteurs respectueux du savoir-faire qui se transmet de génération en génération. Des dégustations et des visites sont organisées sur place d’avril à septembre.
Et dans la région ?
Vous pouvez profiter de votre séjour à Carnac pour découvrir d’autres sites du Morbihan et notamment :
- la presqu’île de Rhuys
- le golfe du Morbihan
- la presqu’île de Quiberon
- le vieux port de Saint-Goustan
- la ville historique de Vannes
- le port de plaisance de la Trinité-sur-Mer