Forteresse Haut Koenigsbourg - ©tristanmimet CC0 Creative Commons

La forteresse du Haut-Koenigsbourg

Dominant la plaine d’Alsace, au cœur des Vosges, le château du Haut-Koenigsbourg semble veiller depuis près d’un millénaire sur la région.
De passage dans le Bas-Rhin, n’hésitez pas à vous arrêter pour visiter cette forteresse restaurée par le Kaiser Guillaume II, … elle vaut réellement le détour.
Et si sa silhouette vous semble quelque peu familière c’est probablement parce que vous l’avez aperçue dans plusieurs films et séries dont « La Grande Illusion » et « Mazarin ». Elle a également inspiré les illustrations de la citadelle de Minas Tirith dans l’édition des années 1980 des livres du Seigneur des Anneaux et le réalisateur du Château ambulant, Hayao Miyazaki.

Un peu d’histoire

La préhistoire

Occupée dès le Paléolithique moyen, l’Alsace a connu une histoire mouvementée depuis la nuit des temps.
Durant le Néolithique, les tribus installées dans la région du Bas-Rhin se sédentarisent, apprennent la poterie et l’agriculture et construisent les premiers villages. Petit à petit, le cuivre et le bronze supplantent la pierre taillée.
Lorsque les peuples celtes issus des civilisations de Hallstatt et de La Tène migrent au cours du 1er millénaire de l’Autriche et de la Suisse vers l’ouest de l’Europe, ils apportent avec eux de nouvelles techniques dont la fabrication d’armes en bronze et en fer. Ils sont également à l’origine du développement des rites funéraires et de l’apparition d’une société hiérarchisée basée sur les classes sociales.

Les Celtes

En Alsace, les Séquanes et les Médiomatriques prennent possession de vastes territoires qui sont convoitées dès la fin du 1er millénaire avant notre ère par les Suèves, des tribus germaniques coalisées et menées par le chef Arioviste. Les Séquanes qui étaient en conflit avec les Éduens s’allient aux Germains.
Arioviste sort victorieux de cette guerre, reçoit en récompense des territoires appartenant aux Séquanes et est reconnu « roi des Germains » par les Romains.
Alors qu’il séjourne à Rome, il est possible qu’Arioviste soit mis au courant des intentions de Jules César qui projette d’envahir la Gaule afin de profiter de la popularité et de la fortune associés aux grandes victoires militaires.

Les Romains

Quoiqu’il en soit, de retour en Germanie, Arioviste rassemble une armée de 120.000 hommes et franchit le Rhin afin de devancer les légions romaines et de s’emparer de l’est de la Gaule.
Cette invasion couronnée de succès sert de prétexte à César pour intervenir dans la région. La Guerre des Gaules débute en 58 avant JC et se termine huit ans plus tard par la soumission des différents peuples celtes.
L’Alsace est intégrée dans la Gaule belgique, une province impériale née de la réorganisation de l’Empire par Auguste.

Les Francs

Après quatre siècles de domination romaine, les Gaules sont peu à peu désertées par les légions et abandonnées à leur sort. En effet, une série de conflits de succession, de meurtres et de complots minent la puissance de l’empire et les soldats sont rappelés dans la péninsule italienne.
Les frontières sont menacées par les invasions barbares. Des peuples germaniques installés au-delà du Rhin n’hésitent plus à franchir le fleuve et à piller les régions de l’est. Les Alamans s’installent en Alsace tandis que les Francs s’implantent dans le nord de la Gaule.

Très vite, des conflits opposent les deux peuples. Les Francs menés par Clovis sortent vainqueurs de cette guerre et intègrent l’Alsace dans le royaume mérovingien.
La région qui fait partie de l’Austrasie lors du partage du royaume entre les fils de Clovis préserve son autonomie et une grande partie de ses traditions. Elle obtient le statut de duché en 640 tout en restant dans l’escarcelle des rois Mérovingiens et ensuite des rois Carolingiens.

Après la mort de Charlemagne, l’Alsace change plusieurs fois de mains au rythme des conflits entre les descendants de l’empereur.
La Francie est réunifiée une dernière fois à la fin du 9ème siècle par Charles III le Gros. A cette époque, les Normands venus de l’Europe du Nord en suivant les fleuves menacent la ville de Paris. Le roi négocie en leur promettant de verser une rançon ce qui déplaît à la noblesse.
Il est destitué en 887 et le royaume est partagé entre Eudes qui devient roi de Francie occidentale et Arnulf de Carinthie qui obtient la Francie orientale, futur Saint-Empire germanique fondé par Otton 1er.
C’est dans ce royaume qu’est intégrée l’Alsace. La région idéalement située entre les Alpes et les pays rhénans profitent d’une période de paix et de prospérité ce qui permet le développement de villes dont Colmar et Strasbourg.

Les Hohenstaufen

Les comtes de Hohenstaufen sont mentionnés pour la première foi dans un décret impérial d’Otton III du Saint-Empire datant de 987.
Cette lignée a probablement été fondée par Frédéric Hohenstaufen qui a donné son prénom à tous les premiers fils de la dynastie.
Dès le 11ème siècle, la famille joue un rôle prépondérant dans la région. Elle possède alors des terres en Allemagne et en Alsace.
En 1079, Frédéric 1er Hohenstaufen reçoit le duché de Souabe au détriment de Rodolphe de Rheinfelden coupable d’avoir comploté contre l’empereur du Saint-Empire Henri IV.
Frédéric 1er obtient également la main de la fille de l’empereur, Agnès de Franconie.

Le fils né de cette union, Frédéric II dit le Borgne, hérite du duché de Souabe au décès de son père, en 1105. Afin de protéger ses terres alsaciennes, il fait construire de nombreux châteaux dont le futur palais impérial des Hohenstaufen à Haguenau, formant ainsi une ligne défensive remarquable.

Le Château de Haut-Koenigsbourg

Peu soucieux de respecter les droits de propriété, Frédéric II n’hésite pas à bâtir ses forteresses sur des terres qui ne lui appartiennent pas.
C’est ainsi que le Castrum Estuphin est construit en 1147 sur un promontoire rocheux inclus dans un domaine qui avait été accordé aux moines du « Prieuré de Lièpvre » par Charlemagne.
Malgré les protestations des moines, il reste la propriété des Hohenstaufen et change de nom en 1157 pour devenir le château de Königsburg (château royal).

La dynastie des Hohenstaufen qui a engendré plusieurs rois germaniques sans compter les ducs de Souabe, décline brutalement au 13ème siècle à la mort de l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen. Celi-ci avait suscité la colère du pape en vivant à l’orientale et en adoptant des mœurs jugées dissolues et une grande partie de ses propriétés est confisquée.

Fortement affaiblis, les Hohenstaufen ne parviennent pas à résister aux ducs de Lorraine qui s’emparent du château de Haut-Koenigsbourg dont ils confient la gestion à des familles issues de la noblesse alsacienne, les Rathsamhausen dans un premier temps et les Hohenstein dans un second temps.

Au 15ème siècle, le château a perdu toute sa puissance et n’abrite plus que des brigands. Plusieurs villes de la région se réunissent en 1462 pour s’emparer des bâtiments qui sont détruits par le feu.
Après avoir brièvement retrouvé un peu de sa superbe lorsqu’il est restauré par ses nouveaux gestionnaires, les Thierstein, il est laissé quasi à l’abandon à partir de 1517, à la mort du dernier représentant de la famille. Le coup de grâce est donné en 1633 par les Suédois, pendant la « Guerre de Trente Ans » lorsque la forteresse déjà fortement dégradée est assiégée et incendiée.
Les ruines sont classées monument historique en 1862 et sont acquises par la commune de Sélestat.

La renaissance du château

Le château de Haut-Koenigsbourg aurait pu connaître le même sort que ses voisins qui ne sont plus aujourd’hui que des ruines s’il n’avait pas été donné en cadeau à l’empereur allemand Guillaume II de Hohenzollern en 1899. En réalité, la commune de Sélestat est soulagée de pouvoir se défaire des ruines dont l’entretien serait trop onéreux.
A cette époque, l’Alsace-Lorraine avait été cédée à l’Allemagne suite à la défaite des Français contre la coalition formée par les États allemands du Nord.
L’empereur souhaitant faire étalage de la grandeur de son pays, a l’idée d’utiliser le château de Haut-Koenigsbourg comme vitrine de cette puissance en le transformant en musée. Il confie la restauration complète de la forteresse à l’architecte et historien allemand Bodo Ebhard.
Celui-ci se base sur les soubassements des anciens bâtiments pour redonner au château l’aspect qu’il devait avoir, selon son interprétation, au début du 16ème siècle. Malgré certaines erreurs, cette restauration terminée en 1908 est remarquable.

Après la défaite allemande en 1918, le château devient propriété de l’État français et le reste jusqu’en 2007 si l’on ne compte pas la période d’occupation allemande durant la Seconde Guerre mondiale.

En 1995, la tempête souffle sur le donjon et un parchemin signé par Guillaume II le 10 mai 1906 est découvert dans l’aigle impérial qui le surmonte. Il témoigne bien de la volonté de l’empereur d’Allemagne de faire de son pays un état souverain dominant le monde :

Au sommet du donjon plane l’aigle étincelant, le cher symbole de la traditionnelle puissance impériale et de la grandeur allemande.
Il étend les ailes sur le château reconstruit et sur le Reichsland qui s’étend à ses pieds. C’est un emblème qui dans le château reconstruit, avec la grâce de Dieu, doit être dressé aux yeux des peuples pour des siècles.
C’est l’élément essentiel qui couronne une œuvre qui se dressera encore dans ‘avenir et témoignera de la disponibilité du peuple pour aider son seigneur impérial dans la reconstruction d’un monument de la puissance et de la majesté allemande.
Des ruines s’est élevée cette construction offensive. Et que Hohenstaufen créa, ce qui malgré les ouragans de la zizanie survécu obstinément, ce qui pendant des siècles, malgré un état de ruines désertes, restait un fier bâtiment, est désormais reconstruit sous l’impulsion de l’aigle allemand et sous la volonté de sa majesté, l’empereur d’Allemagne et roi de Prusse Guillaume II qu Dieu protège, bien au-dessus des bruyants combats de la vie dans la vallée, bien au-dessus des vils combats et querelles, vers le soleil levant, plane l’aigle de l’empire, l’aigle des Zollern. Par la volonté de Dieu.

En janvier 2007, Haut-Koenigsbourg devient propriété du Conseil général du Bas-Rhin.

La visite

Si elle a fait l’objet de polémiques et a été décriée par les romantiques qui auraient préféré conservé le château en ruine, la reconstruction de Haut-Koenigsbourg permet à ses visiteurs de mieux comprendre l’importance et la puissance de cette forteresse médiévale chargée de surveiller les routes commerciales alsaciennes et de prévenir toute invasion de la région.
Bien entendu, il ne faut pas oublier le but de sa restauration et il n’est donc pas étonnant que l’architecte a pris quelques libertés afin de satisfaire le Kaiser.
On découvre ainsi des salles immenses bien éloignées des pièces beaucoup plus petites conçues au Moyen-Âge. La hauteur sous plafond de la salle d’honneur est due à la suppression du second étage du bâtiment ce qui a permis de donner plus de prestance à l’ensemble au détriment de la réalité.
L’aigle impérial qui orne le plafond de la salle, la devise impériale, les blasons et armoiries des Hohenzollern qu’on retrouve notamment au-dessus de la porte principale du château sont quelques-uns des anachronismes intégrés par Ebhard.

Mais ne boudons pas notre plaisir, la visite du château nous plonge réellement dans l’histoire médiévale de l’Alsace. Nous découvrons non seulement le logis seigneurial mais également les fortifications et les nombreuses dépendances du château. Les différents bâtiments, écuries, moulin à vent, forge, fontaine, citerne, cuisines sont les témoins de l’activité permanente qui régnait à l’intérieur de ces murs.
On peut également découvrir une belle collection d’armes et du mobilier régional.

En pratique

Le château se visite toute l’année excepté le 1er janvier, le 1er mai et le 25 décembre :

  • de 9hr30 à 12hr et de 13hr à 16hr30 en janvier, février, novembre et décembre
  • de 9hr30 à 17hr en mars et en octobre
  • de 9hr15 à 17hr15 en avril, mai et septembre
  • de 9hr15 à 18hr de juin à août

Une navette est mise à la disposition des visiteurs au départ de la gare de Sélestat, en haute saison (renseignements et horaires : http://www.haut-koenigsbourg.fr/fr/infos-pratiques/navette-haut-koenigsbourg/).

De nombreuses animations et activités thématiques sont proposés notamment aux enfants, aux familles ou aux personnes handicapées.

Restauration

Il est possible de se restaurer durant la visite soit dans l’espace spécialement conçu à cet effet soit s’attablant à la « Taverne du Haut-Koenigsbourg ». De plus, des soirées médiévales peuvent être organisées à la demande pour les groupes (renseignement au 03 88 82 37 80 ou par mail francois.beloniakhk@gmail.com).

Accessibilité

Seule une partie du château est accessible aux personnes à mobilité réduite. A partir de la cour basse, le circuit comprend 300 marches souvent inégales ce qui complique voire rend impossible la visite aux moins valides. Ils peuvent cependant participer à différents ateliers spécialement conçus pour eux.
Les animaux sont interdits sur le site mais les chiens d’assistance et guide sont autorisés.

Château du Haut-Koenigsbourg
67600 Orschwiller
Tel : 03 69 33 25 00
Mail : haut-koenigsbourg@bas-rhin.fr
Site web : http://www.haut-koenigsbourg.fr

Découvrir la région

Après avoir plongé au cœur du Moyen-Âge, il est temps de découvrir les autres attraits de la région :

Que manger dans la région ?

Riche de ses produits de terroir, la région de Sélestat propose la découverte de ses spécialités :

  • le narreklepfer, une saucisse fabriquée durant le carnaval uniquement par le bouchers-charcutiers de Sélestat. Elle doit obligatoirement mesurer 40 cm et peser 135 grammes.
  • la matelote, un plat à base de poissons de rivière accompagnés d’une sauce au vin blanc et de nouilles
  • le Grand Cru Praelatenberg issu des vignes plantées sur les belvédères du Haut-Koenigsbourg
  • le whisky alsacien vieilli dans des fûts en chêne qui ont contenu du vin de Sauternes
  • le kougelhopf, une pâte levée dans un moule cannelé qui lui donne sa forme si particulière.
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