Loterie : de la Blanque à la Française des Jeux
Nous avons tous, un jour ou l’autre, acheté un billet de loterie dans l’espoir de devenir le prochain gagnant du « gros lot ». Mais connaissons-nous l’origine de ce jeu appelé autrefois la blanque ?
Dans le « Nouveau dictionnaire des origines, inventions et découvertes dans les arts, les sciences » paru en 1827, nous pouvons lire la définition suivante de la blanque :
Espèce de jeu de hasard, en forme de loterie, que nous avons reçu des Italiens.
Aujourd’hui, nous vous proposons de découvrir ce jeu utilisé au 16ème siècle par François 1er dans l’espoir de renflouer les caisses de l’État et son évolution au fil du temps.
Un peu d’histoire
A l’origine
Le principe de la loterie consiste à redistribuer une partie de l’argent misé par les participants par tirage au sort. C’est un jeu où seul le hasard désigne les gagnants. Il se distingue donc des jeux dits de table ou de plateau qui n’impliquent pas nécessairement une mise ou un pari et qui demande de la réflexion comme, par exemple, le « senet » si apprécié des Égyptiens durant la période pré-dynastique, il y a 5.000 ans.
Le jeu de hasard est malgré tout fort ancien et les Chinois se divertissent déjà au Keno, une variante de notre loterie ou du bingo, sous la dynastie Han, c’est à dire entre le 2ème siècle avant JC et le 3ème siècle de notre ère.
Durant l’Antiquité, les Romains offrent des cadeaux durant les fêtes religieuses comme les Bacchanales ou les Saturnales. Si la distribution se fait bien de manière aléatoire, on ne peut pas réellement parler de loterie puisque les participants ne doivent rien miser.
En revanche, il semble certain que le monde arabe préislamique s’adonne aux jeux de hasard. Cette théorie se base sur l’étude des versets du Coran qui condamne cette pratique :
Ils t’interrogeront sur le vin et les jeux de hasard ; dis-leur qu’ils sont criminels et plus funestes qu’utiles (…) (sourate 2)
O croyans ! Le vin, les jeux de hasard, les statues, et le sort des flèches, sont une abomination inventée par Satan. Abstenez-vous-en, de peur que vous ne deveniez pervers. Le démon se servirait du vin et du jeu pour allumer parmi vous le feu des dissensions, et vous détourner du souvenir de Dieu et de la prière. Voudriez-vous devenir prévaricateurs ?(…) (sourate 5)
Il faut cependant attendre le 15ème siècle pour voir apparaître les premières loteries telles que nous les connaissons.
Ces loteries n’ont plus rien de ludique, elles sont utilisées pour financer des travaux publics comme les fortifications des villes ou une aide ponctuelle à la population.
On les appelle parfois « loteries d’État » ou « loteries politiques » et sont particulièrement populaires aux Pays-Bas.
François 1er
Nous sommes en 1515, le roi de France Louis XII, souffrant de la goutte et de maladies intestinales décède sans héritier mâle.
C’est François d’Orléans, son cousin mais également l’époux de sa fille Claude de France qui lui succède. Il est sacré roi de France sous le nom de François 1er, le 25 janvier.
A cette époque, la Renaissance est à son apogée en Italie ce qui permet aux arts et aux sciences de se développer. Léonard de Vinci, Michel-Ange, Raphaël mais également Nicolas Copernic marquent ce mouvement de leur empreinte.
Si la Renaissance est déjà bien installée en Italie et aux Pays-Bas, elle tarde à s’implanter en France. Quelques artistes italiens arrivent cependant dans le pays à la faveur des « guerres d’Italie » déclenchées à la fin du 15ème siècle, lorsque le roi de France, Charles VIII, tente de récupérer le trône de Naples contrôlé par Alphonse V d’Aragon.
Petit à petit, les styles gothique et Louis XII s’effacent au profit du style Renaissance qui devient prépondérant sous le règne de François 1er. Le château de Fontainebleau illustre parfaitement la volonté du roi d’imposer l’art de la Renaissance dans son pays. Il confie non seulement les plans de sa résidence à des architectes italiens mais choisit également des meubles, des œuvres d’art et des objets de décoration en provenance du même pays au point que le château est surnommé « la Nouvelle Rome ».
C’est ainsi que prend naissance l’ « École de Fontainebleau », mouvement principal de la Renaissance française.
L’intérêt porté par François 1er aux artistes et artisans italiens ne l’empêche pas de poursuivre les guerres d’Italie tout au long de son règne. Il veut en effet reprendre le duché de Milan qu’il considère comme son héritage reçu de son arrière-grand-mère, la princesse Valentina Visconti, épouse de Louis d’Orléans mais également fille du duc de Milan.
François 1er fait donc de nombreux séjours en Italie et est même fait prisonnier en 1525.
La blanque
C’est au cours de ces campagnes qu’il se passionne pour les arts italiens. Il découvre également différentes pratiques dont la « blanca » qui se traduit par « blanche ».
Les participants à cette loterie achètent des billets dont seuls les noirs, en minorité par rapport aux blancs, sont gagnants.
Le roi de France récupère cette idée afin de renflouer les caisses du royaume vidées pour le financement des guerres. Il lance la première « blanque » le 21 mai 1539. Elle concerne les particuliers qui sont invités à participer au tirage au sort.
Dans son « Histoire de la loterie » parue en 1851, Alexandre Dumas cite François 1er :
Comme de la part de certains bourgeois et notables personnages de notre royaume, nous a été dit, remontré et donné à entendre que plusieurs de nos sujets, tant nobles, bourgeois, marchands qu’autres, enclins et désirans jeux et ébasements, se sont souventes fois, à faute de jeux honorables permis ou mis en usage, appliqués par cy devant et s’appliquent encore par plusieurs jeux dissolus, telle sorte et obstination que les aucuns y ont consommé et consomment tout leur temps, délaissant par tels moyens toute œuvre et labeur vertueux et mercenaire, les autres tous leurs biens et substances, et que pour faire cesser les-dits inconvénients et abolir et éloigner l’usage pernicieux dont ils ont procédé et procèdent, ne se trouveroit meilleur moyen que de permettre et mettre en avant quelques autres jeux et ébatements èsquels nous, nos dits sujets et chose publique ne puissent recevoir aucun intérêt, proposons entr’autres celui de la Blanque.
Le succès n’est cependant pas au rendez-vous car l’État se montre trop gourmand et ponctionne un trop important pourcentage par rapport aux mises. La blanque est abandonnée du moins officiellement. En effet, bien qu’interdite, les autorités ferment volontiers les yeux lorsque des privés participent à des loteries ou organisent des tombolas.
Au 17ème siècle
La situation financière de a plupart des pays européens est catastrophique à la fin du 17ème siècle. La guerre a ruiné les États et il faut trouver une solution pour renflouer les caisses.
On repense alors aux loteries qui permettent de ponctionner l’argent des particuliers sous une forme ludique.
Cette idée est cependant contraire aux principes de moralité et religieux qui condamnent à cette époque les jeux d’argent et bien entendu les jeux de hasard. Le père dominicain Saint-Thomas d’Aquin, docteur de l’Église spécialisé dans la théologie catholique au 14ème siècle n’a t-il pas affirmer qu « abandonner le jugement du sort au hasard est un pécher » ?
Qu’à cela ne tienne, on va trouver des arguments en faveur de la loterie.
On avance que la loterie telle qu’elle existe alors n’était pas connue à l’époque de Saint-Thomas, on affirme que chaque joueur a la même probabilité que les autres de gagner ou de perdre et que le jeu est donc équitable. C’est oublier un peu vite que le « maître loteur », en l’occurrence la ville ou l’État, se sert au passage sur le dos de tous les joueurs.
Il faut cependant de l’argent et vite car le pays est frappé par une série de grandes famines, résultats d’hivers rigoureux et de mauvaises récoltes, en 1693, 1694 et 1709. On estime que près de 2 millions de personnes perdent la vie durant ces années en France. Les épidémies sont nombreuses, conséquences de la malnutrition et de la mauvaise nourriture. Les hôpitaux sont pris d’assaut par une population de plus en plus pauvre en raison des impôts et du prix du pain et il faut trouver des fonds suffisants pour les faire fonctionner.
Parallèlement, l’État a puisé dans ses réserves durant la « Guerre de Succession d’Espagne » et doit faire face à une crise financière d’une ampleur sans précédent qui va conduire, sous la régence de Philippe d’Orléans, à la mise en place du « système de Law » afin d’éponger les dettes de la France. Ce système basé notamment sur le développement du papier-monnaie montrera cependant vite ses limites.
Au 18ème siècle
Ce n’est que sous le règne de Louis XIV que la loterie est remise au goût du jour en France alors qu’elle fait fureur dans d’autres pays européens. Comme nous l’avons vu, les hôpitaux ne parviennent plus à s’occuper des malades et des pauvres. C’est pour cette raison que les directeurs demandent l’autorisation d’organiser des loteries de charité. Dorénavant on ne parle plus de jeu de hasard immoral mais d’une œuvre permettant de prendre en charge les plus démunis. Très vite, ce type de loterie est adopté par toutes les institutions à but charitable, y compris les monastères et abbayes. On prend de l’argent aux plus fortunés en leur faisant miroiter un gain et on peut ainsi subvenir aux besoins des défavorisés.
Les parlements si réticents jusque là n’ont d’autre choix que de s’incliner face à l’absolue nécessité de trouver de l’argent. Ils refusent cependant de reconnaître toute loterie privée non autorisée.
La loterie ainsi valorisée retrouve un sens moral et sort doucement de l’illégalité. Même les Jésuites si pointilleux admettent que la loterie peut avoir un effet bénéfique.
Le père Claude-François Ménestrier affirme :
La loterie est une invention de charité davantage assimilable à une espèce de trafic, de pact ou de contract qu’à un jeu de hasard.
Il va jusqu’à la comparer au tirage au sort de la fève des galettes des rois et parle de redistribution de l’argent. Il ajoute cependant que la loterie doit être régie par certaines règles en ce qui concerne la valeur des lots ou encore l’âge des participants.
Nous sommes à l’aube du 18ème siècle et la loterie fait son retour en France avec l’approbation plus ou moins ouverte de l’Église Il n’en faut pas plus pour que de nombreuses abbayes instaurent leur propre loterie.
Il faut toutefois obtenir au préalable l’autorisation du roi pour organiser ce jeu calqué sur l’ancienne blanque. Un receveur est alors nommé afin d’enregistrer les billets vendus et de fixer le montant à atteindre. Une fois la loterie remplie ce qui pouvait prendre plusieurs mois, le tirage des numéros se déroule en une seule et unique séance sous le contrôle du représentant du roi. Les numéros sont déposés dans une boîte dans laquelle se trouve également des billets blancs et des billets noirs. On tire simultanément un numéro et un billet et si celui-ci est noir, le numéro est gagnant.
Comme on le voit, Louis XIV surveille étroitement les loteries de charité mais, du moins dans un premier temps, en laisse la gestion aux différentes institutions organisatrices.
Son arrière-petit-fils et successeur, Louis XV ne va pas tarder à trouver que ces loteries qui peuvent rapporter si gros pourraient être d’intéressantes sources de revenus pour l’État.
A partir de 1727, seules trois loteries confiées au « Bureau central des trois loteries » sont dorénavant admises :
- La loterie des Enfants trouvés qui doit venir en aide aux institutions ayant à leur charge les nombreux enfants abandonnés et orphelins, notamment l’Hospice des Enfants Trouvés qui a ouvert ses portes en 1638, fondé par Saint-Vincent-de-Paul. A l’époque de Louis XV, cet hospice est déjà dépendant de l’Hôpital Général. Plusieurs milliers d’enfants sont recueillis chaque année dans les rues de Paris.
- La loterie de Saint-Sulpice qui permet de terminer l’église. La construction commence en 1645 afin de remplacer le bâtiment jugé trop petit en raison du développement du village situé à proximité de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Le curé, Jean-Jacques Olier veut faire de cet édifice, la plus grande église de Paris. Les ennuis s’accumulent, les dons et legs s’amenuisent, les plans ne conviennent pas aux commanditaires, bref en 1678, les travaux sont à l’arrêt, la Fabrique a qui a été confié le chantier supporte une dette de 500.000 livres et les différents artisans qui n’ont pas été payés réclament leur dû.
Les paroissiens doivent s’acquitter de taxes de plus en plus lourdes mais ne voient pas les travaux reprendre. Tout le quartier n’est qu’un immense chantier et les fidèles continuent à se rendre à la messe dans l’ancienne église en partie détruite et à ciel ouvert. Finalement, c’est le nouveau curé de Saint-Sulpice, Jean-Baptiste Languet de Cergy qui trouve la solution, il organise une loterie approuvée par l’État en 1721. Les sommes récoltées sont redistribuées aux participants à hauteur de 85%, la différence servant à financer les travaux. Le tirage se fait chaque mois … pendant 25 ans et rapporte entre 3 et 12 millions de livres selon les sources. Par la suite, la loterie se poursuit et sert à construire ou restaurer d’autres édifices - La loterie des communautés religieuses ou loteries de pitié.
Ces pratiques ne sont cependant pas au goût de tout le monde tel l’abbé Christophe Coudrette qui s’érige contre elles, en 1742:
En 1710, un Jésuite nommé le P. Ménestrier a fait imprimer à Lyon une Dissertation en 150 pages in 12 d’un assez gros caractère. Il s’y déclare l’Apologiste ardent des Loteries (…) Naturellement dans une Apologie expresse des Loteries on auroit dû trouver la discussion des principes Théologiques qui peuvent y avoir rapport. Mais à la place, ce Jésuite fait des descriptions ennuyeuses et fort détaillées des Loteries de son tems (…). Ne s’agissoit-il pas principalement de savoir dans quels cas il est permis d’employer le sort, & si cela est spécialement permis dans la Loterie ? (…) Quelques pages plus bas voici quel est le jugement que l’Auteur porte de cette pratique ? « Enfin, dit-il, je sai que l’Église, qui est en droit d’établir des Règles de Discipline, & de les changer quand elle le juge à propos, a défendu dans un tems les pronostiques, qu’elle avoit autorisés auparavant, & qu’elle pourra rétablir quand elle les croira nécessaires pour le gouvernement des Fidèles. » N’est-ce pas visiblement faire injure à l’Église, que de supposer qu’elle ait fait, ou qu’elle fasse jamais des pronostiques une Règle de Discipline ?
Après 344 pages d’arguments, il conclut ainsi :
Ainsi tout s’élève contre les Loteries : le respect qui est dû à Dieu, qu’il n’est pas permis de tenter, même interprétativement, selon l’expression de S. Thomas : la sainteté de la morale de JC qui exige qu’on retranche tout ce qui par soi-même excite et enflamme la cupidité : le but de la société, qui ne permet pas qu’on cherche à se dépouiller les uns les autres : le bien des États que les Loteries contribuent à ruiner. (…) de tels jeux de sort paroissent être entièrement indignes d’un Chrétien (…) c’est un abus où il est nécessaire de pourvoir, qu’il est nécessaire d’arrêter le cours d’un tel abus, attendu même que ces sortes de Loteries sont proprement jeux de Blanque & de hasard qui ont été perpétuellement défendus.
Couverture du livre Dissertation théologique sur les Loteries par Mr l’Abbé Coudrette – 1742
Peu importe, la loterie devient permanente et des règles sont établies. Chaque billet est vendu à un prix fixe et les tirages se déroulent trois fois sur le mois : le 10 pour la loterie des Enfants trouvés, le 20 pour les communautés religieuses et le 30 pour Saint-Sulpice. De plus, la distribution des gains et l’attribution des billets gagnants non réclamés passent sous le contrôle du Ministère des Finances.
Si la vocation des loteries est dans un premier temps charitable, il faut bien reconnaître que les Parisiens l’oublient bien vite. Ils prennent dorénavant plaisir à jouer.
Parallèlement, de nombreuses demandes sont introduites afin de profiter de ces loteries pour organiser une foire, entretenir un édifice public ou religieux, éponger la dette d’une paroisse, …. si bien que le prix du billet augmente.
De plus, les loteries n’ont plus toujours un motif caritatif et servent à financer tout type de travaux d’utilité publique pour autant que ceux-ci ne soient pas permanents.
C’est ainsi que l’Hôtel-de-Ville de Paris bénéficie de cet arrangement en 1760.
Le loto génois
Nous avons déjà vu que la blanque, ancêtre de la loterie a d’abord connu le succès en Italie avant de venir en France. Il en est de même pour un jeu similaire que nous connaissons bien le loto ou plus exactement le loto génois puisque c’est à Gênes qu’il a fait son apparition.
A l’origine, en 1610, il s’agit d’un pari fait sur l’élection des cinq sénateurs désignés par tirage au sort tous les six mois. Les habitants de la République de Gênes ont l’habitude de miser sur un ou plusieurs noms, sur l’ordre de sortie de ceux-ci, … et les gains sont proportionnels aux risques encourus. Les paris sont enregistrés dans des bureaux du loto.
Ce loto qui est introduit en France par le Vénitien Giacomo Casanova, en 1757, se distingue de la loterie traditionnelle par le fait qu’on peut plus facilement manipuler le pourcentage du gain récupéré par l’organisateur donc le roi de France. De plus, les tirages se déroulent chaque semaine, de quoi maintenir en haleine les joueurs. Le loto génois permet notamment de financer l’École militaire.
La loterie royale de France
Il devient évident que l’argent dépensé dans ces nouvelles loteries qui se multiplient représentent un manque à gagner pour les institutions de charité qui s’insurgent.
C’est pour cette raison que la « Loterie royale de France » est créée officiellement en 1776, pendant le règne de Louis XVI même si on parlait déjà depuis longtemps de « lotterie royale ».
Il est dès lors stipulé que seule une partie du produit de cette loterie est destinée à la charité ce qui sous-entend que le roi a toute liberté pour attribuer des fonds à d’autres bénéficiaires. Plus personne ne peut se plaindre.
A partir de cette date, les parieurs reçoivent des reconnaissances délivrées par les receveurs et contenant les informations nécessaires comme le numéro sur lequel est fait la mise et la somme engagée.
Loto et loteries connaissent un succès grandissant si bien que leur impact inquiète car elles sont accessibles à toutes les classes sociales. Les « petites gens » sont même encouragées à y participer car les billets qui peuvent sembler trop onéreux sont divisibles en coupons ou en dixièmes.
Dorénavant, la loterie est devenue une affaire commerciale et balaie ainsi toute notion de charité. De plus, elle est jugée amorale puisque la valeur du travail ou du mérite est bafouée au profit de l’appât du gain facile.
Le Parlement de Paris qui prône la vertu et veut combattre la passion voire la dépendance au jeu va même interdire les jeux de hasard incluant les loteries en 1750. Le jugement se base sur le fait que ces jeux sont organisés en vue de s’enrichir sur le dos du peuple « ignorant ». Les magistrats craignent que les hommes crédules se laissent tenter par l’achat d’un billet au détriment du pain ce qui entraînerait misère et famine au sein de son foyer.
Ils s’opposent ainsi ouvertement à la volonté du roi. La loterie royale rencontre également l’opposition de la police qui craint des abus, des faillites, des délits.
Peine perdue, les loteries sont trop profitables pour les supprimer !
En 1776, le contrôleur général des Finances, autorise uniquement la tenue des loterie des Enfants Trouvés et de la Pitié ainsi que de la Loterie royale de France qui assure près de 7% des revenus personnels du roi.
La Loterie royale est dès lors gérée par l’Administration générale des Loteries qui remplace le bureau central des trois loteries.
La Révolution condamne sévèrement la pratique de la loterie royale qui est supprimée en 1791. Elle renaît temporairement de ses cendres en 1799 lorsque Napoléon veut à son tour profiter des revenus engendrés si facilement avant de disparaître définitivement en 1836.
Des loteries de charité continuent cependant à être organisées dans tout le pays, ci-dessous dans la ville de Strasbourg.Même les enfants ont leurs jeux basés sur le même principe comme en témoigne l’estampe « Loterie des jeux » éditée en 1862.
Et aujourd’hui ?
La loterie nationale française est née le 22 juillet 1933 malgré l’opposition de nombreuses associations qui veulent défendre l’ordre moral. A cette époque, elle retrouve une vocation d’entraide puisqu’elle est destinée à porter secours aux invalides de guerre, aux anciens combattants et, ponctuellement, aux agriculteurs victimes de catastrophes. Le premier tirage se déroule au Palais du Trocadéro, le 7 novembre de la même année.
Dès l’année suivante, les joueurs peuvent acheter des billets entiers, des cinquièmes ou des dixièmes afin de toucher une nouvelle fois toutes les couches de la population.
Le tirage devient hebdomadaire et de nombreuses versions et tirages spéciaux sont lancés.
Le Loto voit le jour en 1976 et est géré par la « Société de la Loterie nationale et du Loto national » qui remplace la Loterie nationale française.
Elle deviendra successivement France Loto en 1989 et la Française des Jeux en 2009.
Bien entendu, de nos jours, le Loto est simplement considéré comme une possibilité si infime soit-elle de s’enrichir rapidement et facilement.
Et pourtant, depuis peu, le ministère de la Culture a lancé, sur une idée de Stéphane Bern, un « Loto du Patrimoine » qui renoue un peu avec l’ancienne vocation de la loterie.
Le but de ce Loto est de réunir une importante somme d’argent destinée à la sauvegarde de nos monuments historiques. Le premier tirage a eu lieu le 14 septembre 2018 et a rencontré un grand succès auprès des Français. Un joueur a remporté 13 millions d’euros et cinquante autres ont gagné 20.000 euros tandis que 3,5 millions d’euros vont être consacrés au financement de la restauration et de l’entretien du patrimoine.
Cette opération a de plus permis de sensibiliser le public à la nécessité de préserver les monuments, témoins de notre histoire et de notre culture ce dont se félicite la « Fondation du Patrimoine » qui est actuellement en charge de près de 3.000 projets.
En français soutenu on abrège 1er, 1re, 2e, 3e etc.