La Bastille, de Forteresse à Prison
Si vous visitez ou séjournez à Paris, vous êtes certainement déjà passés place de la Bastille. Dominée par la colonne de Juillet, cette place si animée a été le théâtre d’une importante page de l’histoire de France. C’est en effet ici que s’élevait autrefois la Bastille Sainte-Antoine, la prison d’État prise d’assaut par les Parisiens à l’aube de la Révolution de 1789.
Aujourd’hui, nous vous invitons à découvrir l’histoire de ce lieu mythique mais également celle des « bastilles », éléments importants des fortifications médiévales.
Un peu d’histoire
Depuis la nuit des temps, les hommes ont cherché des moyens de se défendre d’abord contre les animaux et ensuite contre les autres tribus. Dans un premier temps, ils se contentent de se mettre à l’abri dans des grottes ou dans des abris sous roches qui leur permettent de se cacher et de se protéger des intempéries ou du froid.
Avec la découverte de l’agriculture marquant le début du Néolithique, les hommes autrefois nomades se sédentarisent et construisent les premiers villages. Très vite, ils ressentent le besoin de prévenir les éventuelles attaques et leurs cités sont entourées de palissades en bois et dotées de tours permettant de surveiller les environs.
On parle déjà de forteresses 2.000 ans avant notre ère. L’apparition de villes fortifiées modifient également les techniques de guerre. Les ennemis s’installent devant les murailles et établissent des sièges qui peuvent durer plusieurs mois voire années.
Parallèlement, des machines de guerre de plus en plus sophistiquées sont inventées. Béliers, tours mobiles permettent d’ébranler les murs. En réponse, les ingénieurs militaires perfectionnent les murailles qui sont dorénavant plus épaisses et équipées de contreforts capables de résister aux assauts des ennemis.
Les Romains
Les Romains excellent dans l’art de la guerre. D’un côté, ils solidifient les remparts destinés à protéger leurs villes en les entourant d’un large fossé et en y adjoignant des tours semi-circulaires et, d’un autre, ils perfectionnent leur système d’attaque.
On peut notamment lire la description de ce système dans les « Mémoires de César » :
Tandis que ces événements se passent en Espagne, C. Trebonius qui a été laissé au siège de Massilia (Marseille) dresse contre la ville les mantelets et les tours, et forme une double attaque (…) C. Trebonis rassemble pour ces travaux un grand nombre d’hommes : il tire de la Province des chevaux, des matériaux, des fascines et élève une terrasse de 80 pieds de haut. (…) En outre, les Albices faisaient de fréquentes sorties et lançaient des feux sur la terrasse et les tours : nos soldats les repoussaient aisément, et les rejetaient dans la ville, après leur avoir fait essuyer de grandes pertes. (…)
Les légionnaires qui travaillaient aux ouvrages de droite, jugèrent qu’une tour de briques, élevée au pied de la muraille, pourrait leur être d’un grand secours contre les fréquentes sorties de l’ennemi : celle qu’ils avaient faite d’abord était basse et petite, cependant elle leur servait de retraite. (…) On reconnut ensuite par d’habiles combinaisons que l’on pourrait, avec de l’industrie, en tirer un grand avantage, si on l’élevait à la hauteur d’une tour.
Lorsque la tour eut été élevée à la hauteur d’un étage, ils placèrent les solives de manière que la maçonnerie en couvrit l’extrémité, afin qu’il n’y eût point de partie saillante où le feu de l’ennemi pût s’attacher.
Au-dessus de ce plancher, ils continuèrent les murailles de briques (…) ils posèrent ensuite deux solives en croix pour y suspendre la charpente qui devait servir de toit à la tour (…) ils couvrirent le plancher de briques et de mortier pour qu’il fût à l’épreuve du feu et jetèrent par)dessus des couvertures grossières, de peur que le plancher ne fût brisé par les traits des machines ou que les pierres lancées par les catapultes ne fissent sauter les briques. (…). Lorsqu’ils furent assurés que de cette tour ils pouvaient défendre les ouvrages, ils commencèrent à construire une galerie qui, du bas de la tour, devait les mener à celle des ennemis et au mur de la ville.(…) La galerie était défendue par les machines et par les traits lancés du haut de notre tour de briques, les assiégés étaient à la fois écartés de leurs tours et de leur muraille (…) les ennemis redoutant le pillage de leur ville, sortent en foule, sans armes, la tête couverte d’un voile et tendent leurs mains suppliantes (…).
Le Moyen-Âge
Comme nous le voyons, les Romains sont passés maîtres dans la construction militaire. Il n’est donc pas étonnant que la plupart de leurs innovations sont conservées bien après la chute de l’empire et les invasions germaniques.
Les tours de défense et d’attaque telles que décrites par Jules César au 1er siècle avant JC sont toujours utilisées au Moyen-Âge. C’est à cette époque qu’on parle de bastille ou de bastide. Il ne faut cependant pas confondre la bastide, élément d’architecture militaire, avec la bastide qui désigne une ville nouvelle bâtie à partir du 13ème siècle dans le sud-ouest de la France afin de protéger la population d’une région ravagée par la « Croisade des Albigeois », un conflit opposant le pape aux Cathares accusés d’être hérétiques.
A l’époque médiévale, les fortifications évoluent rapidement. Les premières mottes castrales souvent considérées comme les ancêtres des châteaux-forts font leur apparition. Ces sortes de donjons en bois sont entourés de palissades et de fossés. Ils sont construits à proximité des voies commerciales afin d’en assurer la sécurité. Petit à petit des villages se blottissent à leur pied et bénéficient de la protection du seigneur dont le logis se développe pour devenir un véritable château en pierres vers le 11ème siècle.
Mais revenons quelques siècles en arrière pour découvrir que les tours autrefois mobiles font dorénavant partie intégrante de tous les ouvrages de fortifications qu’il soit en bois ou, plus tard, en pierre. Ces bastilles servent donc à défendre les villes au même titre que les murailles, châtelets, donjons, barbacanes, …
Lorsque les Normands profitant de leurs connaissances en navigation effectuent des raids de plus en plus loin de leurs contrées, il devient indispensable de renforcer la défense des villes. Ces incursions se font fréquentes au 9ème siècle et les drakkars qui ont un très faible tirant d’eau remontent aisément les fleuves, principalement la Seine et la Loire, inquiétant ainsi tour à tour Rouen, Bordeaux, Toulouse ou encore Nantes et Valence. Les hommes du Nord menacent une première fois Paris en 845.
Il est temps de réagir et des forteresses sont construites sur les fleuves afin de mieux contrôler la navigation. Les anciens remparts qui datent souvent de l’époque gallo-romaine sont restaurés ou remplacés.
Le roi Charles II dit le Chauve succède à son père, Louis 1er dit le Pieux, en 840. Le royaume est à cette époque la proie non seulement des Vikings mais également de guerres civiles et de luttes pour le pouvoir.
En effet, à cette époque, le royaume n’est pas transmis au fils aîné du roi mais est partagé entre tous ses héritiers mâles ce qui engendre de nombreuses disputes et affaiblit le pays.
Charles II peine à redresser la situation ce qui laisse aux Normands tout le loisir d’avancer toujours plus loin dans les terres et de s’emparer des richesses des abbayes et des seigneurs qui se retournent contre leur roi jugé trop faible et font appel à son frère, Louis-le-Germanique. De plus, son neveu, Pépin II d’Aquitaine tente de reprendre ses terres accordées, injustement pense-t-il, à son oncle par Louis-le-Pieux.
Charles II doit dès lors faire face sur tous les fronts ce qui affaiblit encore le prestige et par conséquent l’autorité du pouvoir royal. Il offre des rançons aux Normands afin qu’ils se retirent de ses terres mais, celles-ci à peine touchées, les raids reprennent.
Paris est encore assiégée à plusieurs reprises, en 856, en 861 et en 885. Cette dernière attaque se déroule sous le règne de Charles III le Groset marque le déclin de la dynastie carolingienne.
Le règne de Charles II est souvent considéré comme un désastre par les historiens. Même sa mort reste sujette à caution. Il est probablement décédé des suites d’une pleurésie à Brios (actuellement Avrieux), en Savoie, sur le chemin de retour d’une campagne contre les Sarrasins en Italie. La rumeur prétend cependant qu’il a été empoisonné par l’un de ses médecins.
La défense de Paris
Le royaume franc vit donc une période sombre en ce milieu de 9ème siècle et les villes se dotent de nouvelles fortifications. C’est ainsi que les portes mais également les ponts des villes sont munis d’ouvrages militaires, des tours massives appelées châtelets ou castillets.
Paris a longtemps été protégée par les anciennes fortifications romaines constituées d’un mur d’une épaisseur moyenne de 2,5 mètres. La ville a cependant de nombreux points faibles, principalement les ponts de bois enjambant la Seine.
Après le siège de 861, Charles-le-Chauve entreprend de renforcer ce système défensif en effectuant les réparations des anciennes murailles mais surtout en améliorant la structure des ponts et en les équipant de châtelets. Cette défense permettra aux Parisiens de résister 18 mois lors du siège de 885 avant d’être libérés lorsque Charles-le-Gros verse la rançon aux Vikings et les autorise à traverser le royaume pour attaquer la Bourgogne.
Ces châtelets construits en bois sont remplacés par des tours en pierres et prennent de l’importance au début du 12ème siècle. Ils surplombent parfois les routes menant aux cités et sont percés de doubles portes défendues par des fossés et des ponts-levis.
La plupart de ces châtelets ont été détruits en raison de l’agrandissement des villes. C’est notamment le cas du « Grand Châtelet » de Paris construit sous le règne de Louis VI et démoli au 19ème siècle.
Les châtelets ne se différencient guère des bastilles, ces doubles tours parfois rondes ou carrées flanquant les remparts des villes afin de protéger leurs différentes entrées.
Nous sommes au milieu du 14ème siècle lorsque le prévôt des marchands de Paris chargé de l’approvisionnement, du commerce fluvial et des travaux publics de la ville, Étienne Marcel ordonne la construction de bastilles afin de protéger les quartiers situés au nord de la Seine. Le chantier s’interrompt cependant après l’assassinat du prévôt par les bourgeois de la ville qui l’accusent d’avoir voulu livrer Paris aux Anglais.
La Bastille
L’édification
En 1364, Charles V dit le Sage succède à son père Jean II dit le Bon alors que la France est en pleine tourmente. La « Guerre de Cent Ans » mais également de nombreux conflits internes mettent en danger la dynastie des Valois. Charles V parvient cependant à redresser la situation et reprend la plupart des territoires perdus par la force ou la diplomatie après avoir totalement réorganisé l’armée.
Parallèlement, il entreprend de poursuivre les travaux de fortifications de Paris commencés par Étienne Marcel.
C’est ainsi que l’Enceinte de Charles V est construite sur la rive droite de la Seine. Elle se présente sous la forme d’un premier fossé, d’un remblai de terre, d’un second fossé rempli d’eau et enfin d’un second remblai de terre surmonté d’un mur, l’ensemble mesurant 90 mètres de large ce qui met la ville à l’abri des bombardes et autres machines de guerre.
C’est également Charles V qui ordonne la construction de la Bastille Saint-Antoine, une forteresse chargée de protéger la porte du même nom ainsi que le logis royal appelé Hôtel Saint-Pol et la route menant au Château de Vincennes ce qui permet de sécuriser une éventuelle fuite de la famille royale en cas de révolte populaire.
C’est le prévôt de Paris, Hugues Aubriot, qui est chargé de superviser sa construction.
La première pierre de la Bastille est posée le 22 avril 1370 et le chantier prend fin en 1382, deux ans après le décès de Charles V, affaibli par la maladie, probablement la tuberculose, mais surtout par le chagrin occasionné par le décès en couches de son épouse, Jeanne de Bourbon.
L’architecture
A l’origine, la Bastille est une petite construction à deux tours bâtie en 1356 sur ordre d’Étienne Marcel. Charles V ordonne en 1367 de l’inclure dans une enceinte, de rehausser les deux tours existantes et de leur adjoindre six nouvelles afin de former un fort pouvant accueillir une garnison.
Ce bâtiment appelé « fort et bastide Saint Anthoine lez Paris » et plus tard « Bastille Saint-Antoine » se présente donc sous la forme d’un petit château à huit tours (les tours du Coin, de la Chapelle, du Trésor, de la Comté, de la Bertaudière, de la Bazinière, du Puis et de la Liberté).
Il mesure 66 mètres sur 34, s’élève à 24 mètres de haut et est entouré d’un fossé inondé de 25 mètres de large.
Ses fonctions
Comme nous l’avons vu, la fonction première de la Bastille est militaire puisqu’elle est chargée de protéger une partie de Paris et une éventuelle fuite du roi vers Vincennes.
Or, il s’avère très vite qu’elle ne remplit pas correctement ce rôle défensif, loin s’en faut, puisqu’elle est prise à de nombreuses reprises durant les siècles suivants. Les Armagnacs, les Bourguignons, les troupes du Prince de Condé ou encore les Ligueurs s’en emparent aisément malgré quelques améliorations apportées au plan d’origine, notamment la construction de nouveaux bastions.
De simple forteresse, la Bastille change alors régulièrement de vocation et devient tour à tour prison d’État, arsenal, lieu de réception ou encore entrepôt du trésor royal.
Prison d’État
La Bastille sert une première fois de prison d’État sous le règne de Louis XI, au 15ème siècle. Des personnalités importantes y sont enfermées, notamment Louis de Luxembourg, Connétable de Saint-Pol, accusé de haute trahison car il apportait son soutien au duc de Bourgogne et probablement au roi d’Angleterre contre Louis XI.
Il en est de même pour le duc de Nemours et comte de la Marche Jean d’Armagnac qui y est enfermé dans une cage de fer suspendue avant d’être exécuté en 1477.
En temps ordinaire, les conditions de détention ne sont cependant pas mauvaises à la Bastille du moins lorsqu’on est un prisonnier important. Les détenus pour raison politique ont souvent leur propre domestique et sont installés dans de vastes cellules de plusieurs pièces, meublées et chauffées. Les repas sont bons et copieux, les visites et la correspondance sont autorisées.
En revanche, les prisonniers de droit commun incarcérés dans un autre quartier sont enchaînés et n’ont qu’une simple paillasse en guise de lit.
Les plus récalcitrants sont enfermés dans de sombres cachots situés sous le niveau des douves lorsqu’ils ne sont pas soumis à la question dans une salle de torture.
La Bastille accueille de nouveaux prisonniers durant les Guerres de religion des 16ème et 17ème siècles et voit passer entre ses murs le prince de Condé Henri II de Bourbon, le duc de Montmorency ou encore le duc Charles de Valois-Angoulême ainsi que l’écrivain Montaigne accusé d’avoir été un négociateur entre le roi et Henri de Navarre conte la Ligue. Montaigne ne fait cependant qu’un bref passage à la Bastille et est libéré le lendemain de son incarcération.
Si la ville de Paris compte différents établissements pénitentiaires, c’est entre ses murs que sont enfermés les prisonniers arrêtés et incarcérés sans jugement, sur lettre de cachet.
Ces lettres également qualifiées de closes ou fermées sont signées par le souverain lorsque celui-ci souhaite écarter discrètement des personnes mettant la couronne ou l’État en danger. Elles sont fermées par le sceau royal qui ne peut être brisé que par le destinataire.
Les lettres de cachet ne sont pas uniquement utilisées pour faire emprisonner une personne accusée de trahison ou d’atteinte à la sécurité du royaume. Elles servent notamment à transmettre des ordres à un officier ou à un membre du Parlement.
Au fil du temps, les lettres de cachet perdent leur caractère d’exception et concernent la majorité des demandes d’emprisonnement ou, au contraire, de remise en liberté. Elles ne sont plus envoyées seulement en cas de trahison mais également pour les dettes de jeux, le libertinage et même en cas de folie ou d’irresponsabilité. Elles sont souvent demandées par les familles qui espèrent ainsi « éliminer » un problème sans trop de tapage public.
Le fonctionnement
Lorsqu’un prisonnier est présenté au portes de la Bastille, une cloche retentit, signal pour les gardes qui se doivent de détourner le regard ou même de se couvrir le visage afin de garantir l’anonymat au nouvel arrivant.
La prison est gérée par un gouverneur qui outre une forte rémunération profite d’un logement de fonction situé dans une Cour de la Bastille. Il a sous ses ordres, un lieutenant du roi assurant la sécurité dans l’enceinte de la prison, d’un major s’occupant des finances, des « porte-clefs » chargés de nourrir et de surveiller les prisonniers et des gardes surveillant l’enceinte.
La Bastille accueillait entre 45 et 60 prisonniers grand maximum pour une durée excédant rarement deux ans. Au total, on estime que seulement 6.000 prisonniers ont été incarcérés entre le 14ème siècle et la Révolution.
Les prisonniers célèbres aux 17ème et 18ème siècles :
- Nicolas Fouquet, surintendant des finances sous le règne de Louis XIV possède l’une des plus importantes fortunes de France. Il fait bâtir le château de Vaux-le-Vicomte où il donne des fêtes somptueuses. Accusé de péculat (détournement de l’argent public) et de lèse-majesté, il est arrêté par d’Artagnan, le 5 septembre 1661 et est transféré à la Bastille en attendant son jugement. Ses biens sont confisqués et il est banni du royaume. Il décède à Pignerol, en Italie.
- L’homme au masque de fer dont l’identité reste secrète est certainement le plus célèbre et le plus mystérieux des hôtes de la Bastille où il est envoyé en septembre 1698. Il y reste jusqu’à sa mort, le 19 novembre 1703.
- Voltaire accusé d’avoir tenu des propos diffamatoires à l’encontre du régent Philippe d’Orléans et de sa fille Marie-Louise-Elisabeth d’Orléans y fait un bref séjour.
- Donatien Alphonse, marquis de Sade est emprisonné à diverses reprises, pour dettes, pratiques sexuelles réprouvées par la morale ou encore pour ses opinions politiques. Sur les 27 années de détention qu’il accumule tout au long de sa vie, il passe cinq ans à la Bastille, de 1784 à 1789. Il y écrit notamment « Les Cent Vingt Journées de Sodome ».
La Révolution française
A la veille de la Révolution française de 1789, la Bastille a mauvaise réputation. On parle d’emprisonnements arbitraires, d’exécutions sans jugement, de tortures, de censure intellectuelle. De plus, le peuple s’insurge contre le budget consacré au salaire du personnel et surtout du gouverneur de la prison. Il n’est donc pas étonnant que sa fermeture et même sa destruction sont exigées dans les « cahiers de doléance de Paris » rédigés par les Révolutionnaires.
Nous sommes le 14 juillet 1789 lorsque les Parisiens prennent la Bastille d’assaut. Les révolutionnaires tentent de persuader le gouverneur, le marquis de Launay, de leur donner des armes et de la poudre. Lorsque les gardes ouvrent le feu sur la foule amassée devant les portes de la Bastille, une véritable bataille s’engage faisant une centaine de morts. Devant la détermination des Parisiens, de Launay capitule. Malgré la promesse de lui laisser la vie sauve, il est aussitôt lynché par la foule et sa tête est exposée sur une pique. Il devient ainsi l’une des premières victimes de la Révolution.
Le but premier des révolutionnaires est donc de s’emparer de la poudre et des armes stockées à la Bastille. C’est un peu par hasard que les prisonniers sont libérés. Ils ne sont d’ailleurs que sept et pas des plus reluisants puisque seuls quatre faussaires, deux aliénés mentaux et le comte de Solages accusé d’inceste sont lâchés dans la nature.
Dès le lendemain, le bâtiment devenu le symbole même de la Révolution du peuple français contre l’absolutisme du roi est démoli.
Ces travaux sont entrepris sans aucune autorisation par l’entrepreneur en bâtiments, Pierre-François Palloy qui n’hésite pas à embaucher 400 ouvriers dans la nuit du 14 au 15 juillet. Comme il paie de sa poche leur salaire, l’Assemblée constituante lui accorde officiellement ce chantier. Il sera surnommé le « Patriote ».
Palloy vend les pierres qui sont réutilisées notamment pour la construction du pont de la Concorde. Il récupère néanmoins une partie de ces pierres qu’il fait tailler en blocs afin de réaliser des modèles réduits, reproductions de la Bastille. Lorsque les pierres viennent à manquer, il continue de fabriquer les maquettes par moulage en mortier. Ces modèles réduits sont offerts aux différents départements créées après la Révolution, aux ministres et même aux personnalités en visite en France.
On peut encore découvrir ces objets surprenants dans différents musées ou lieux emblématiques de France, notamment au Musée Carnavalet et au Musée des Archives nationales de Paris ainsi que dans la salle du Jeu de Paume de Versailles.
Il vend également d’autres « souvenirs » de la Bastille comme les chaînes des prisonniers ou les marques laissées par ceux-ci sur les boiseries.
Et aujourd’hui ?
Bien entendu, il n’y a plus guère de trace de la Bastille à Paris.
Et pourtant, à y regarder de plus près, on peut encore deviner son emplacement dessiné par des pavés plus clairs sur la Place de la Bastille, au cœur de Paris.
Dans le square Henri Galli situé dans le 4ème arrondissement, les visiteurs peuvent découvrir quelques vestiges de l’ancienne Tour de la Liberté retrouvées en 1899 à l’occasion du creusement de la ligne 1 du métro, rue Saint-Antoine. Ils ont été déplacés dans le square afin de conserver la trace de ce monument de l’histoire de France.
Et si vous empruntez la ligne 5 du métro, en direction de Bobigny, un morceau de la muraille est également visible sur le quai de la station Bastille.